Article soumis à Soninkara.com par Monique Chastanet.
Résumé
A partir d'un proverbe soninké recueilli dans la région de Bakel (haut Sénégal), j'ai reconstitué l'histoire d'une ancienne ressource, agricole et de cueillette. Il m'a fallu plusieurs années pour identifier la plante citée dans ce proverbe car elle n'était plus cultivée depuis le milieu du 20e siècle. J'ai pu le faire en croisant sources orales et sources écrites, notamment des archives du 18e et du 19e siècle. Une fois mise sur la piste du sésame, grâce à de nouvelles enquêtes et à différents travaux, j'ai compris que plusieurs espèces étaient en jeu, cultivées ou de cueillette (Sesamum indicum, Sesamum radiatum, Sesamum alatum et Ceratotheca sesamoides). Les plantes spontanées, quant à elles, continuent d'être utilisées à des fins magico-thérapeutiques. Le sésame était autrefois cultivé comme plante oléagineuse, parmi différentes sources de matières grasses, végétales et animales. Il a été concurrencé par l'arachide, au 18e et surtout au 19e siècle, pendant la période de la traite et au début de la colonisation. C'est dans le haut Sénégal, en effet, qu'a commencé la culture commerciale de cette plante d'origine américaine, bien avant le développement du bassin arachidier sénégalais. Cette étude montre comment un proverbe peut, bien malgré lui, jouer un rôle mémoriel et devenir source d'histoire.
Mots clés
Sésame, arachide, agriculture, cueillette, alimentation, usages magico-thérapeutiques, savoirs locaux, proverbes, sources orales et sources écrites, Soninkés, haut Sénégal.
Connu pour être le peuple qui dirigea l’empire du Ghana (wagadu) entre 5ème et 11ème siècle, les soninkos se trouvent principalement dans 4 pays Ouest-africains (La Mauritanie, Le Mali, Le Sénégal et La Gambie).
En dehors de ces pays d’origine, des fortes diasporas sont présentes dans plusieurs pays (En Europe, En Amérique et En Afrique centrale). Islamisés depuis plusieurs siècles, les soninkos s’accrochent à leurs coutumes et traditions ancestrales qui régissent leur vivre-ensemble. Par ce fait, dans l’imaginaire collectif soninké, on peut constater une fierté quasi hautaine par la qualité d’être soninke.
Notre modeste travail de réflexion consistera de disséquer cette fierté Soninkaaxu dans son aspect culturel, social-politique et religieux. Nous tenterons d’apporter un éclairage réfléchi sur certains termes (promouvoir la culture, le mariage, la solidarité et la fraternité) et leurs réalités concrètes dans la société soninké.
A la naissance d’un bébé soninké, nos félicitations et nos salutations vont aux parents avec passion et dévouement. Au jour du baptême du bébé, notre invocation-prière la plus répandue à l’endroit du nouveau-né et ses parents est la suivante : Qu’Allah le rende meilleur que ses parents dans le bien évidemment.. !!!
Dans l’imaginaire collectif soninké, cette prière porte l’espérance que le nouveau-né soit fraternel, respectueux, solidaire et en tout un bon soninké épousant son milieu passivement selon les règles, les us et les conditions en place. Cette logique de vouloir conditionner l’être humain dès son bas âge constitue les premiers jalons du système des castes. Quiconque comprend le système des castes, aura compris une grande partie de ladite fierté Soninkaaxu.
L’immigration des Soninkés en Europe a considérablement changé de visage. D’une immigration militaire pendant les deux grandes guerres, elle a changé en une « immigration de travail » pour finir par une « immigration des épouses » ou de peuplement au milieu des années 1970, facilitée par la loi sur le regroupement familial. Ceci a eu pour conséquence un rajeunissement et une féminisation de l’immigration soninké. Plusieurs femmes soninkées, venues des villages, ont amené leurs enfants « ainés » et ont ainsi poursuivi durablement leur maternité.
On assista alors à la naissance d’une seconde immigration soninkée bénéficiant d’un statut spécial. Citoyens français de droit, ils changent complètement le visage de la migration soninké. Ils sont intégralement français, naissent avec les mêmes droits et devoirs que les Dupont, les Roux, les Dubois…Ils fréquentent les écoles de la République, assimilent un mode de vie occidental, baignent dans un modèle social complètement différent de celui de leurs parents.